TF1 : 400 kg de cocaïne disparus : deux commissaires en garde à vue
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L’affaire éclabousse la police judiciaire marseillaise jusqu’au sommet de sa hiérarchie. Depuis lundi matin, la cheffe de l’office anti-stupéfiants et son adjoint sont entendus par la police des polices.
L’Inspection générale de la police nationale (IGPN) cherche à savoir comment une cargaison de 400 kilos de cocaïne d’une valeur de 21 millions d’euros a pu disparaitre. La garde à vue des deux hauts gradés de l’OFAST de Marseille peut être prolongée jusqu’à vendredi matin.
Le Parisien : Disparition de près de 400 kilos de cocaïne : les patrons de l’Office antistups de Marseille placés en garde à vue
INFO LE PARISIEN. L’enquête sur les méthodes du service d’élite antidrogue marseillais vise désormais la haute hiérarchie : deux commissaires, chefs de l’Ofast Marseille, ont été placés en garde à vue ce lundi matin dans les locaux de l’IGPN, la police des polices. Au cœur des soupçons, notamment, une livraison surveillée de cocaïne qui a viré au scandale.
C’était l’opération anti-drogue qui devait faire entrer l’Ofast (Office anti-stupéfiants) de Marseille dans la légende. L’idée : suivre l’entrée en France de près de 400 kilos de cocaïne en provenance de Colombie. Puis espérer faire tomber un grand narcotrafiquant français à la tête d’un quartier phocéen générant jusqu’à 1,3 million d’euros mensuel de vente de stupéfiants.
Las, l’opération a viré au fiasco. La drogue s’est volatilisée, aucune interpellation n’a été réalisée, et l’affaire a révélé les méthodes douteuses d’enquêteurs, entre arrangements avec le code de procédure pénale et soupçons de corruption. Pire : toute la hiérarchie de ce service d’élite est désormais éclaboussée, faisant craindre un scandale policier de grande ampleur.
Selon nos informations, les deux patrons de l’antenne de l’Ofast de Marseille ont été placés en garde à vue ce lundi matin dans les locaux de la Division nationale des enquêtes (DNE) à Paris, l’unité de l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) chargée des dossiers sensibles.
Il s’agit d’une commissaire divisionnaire, numéro 1 de l’Ofast Marseille, et de son adjoint, un commissaire principal. Ces hauts gradés sont entendus dans le cadre de l’information judiciaire, pilotée par la Junalco, ouverte notamment pour « importation et trafic de stupéfiants en bande organisée », « faux en écriture publique » et « atteinte à la vie privée ». Dans cette affaire sans précédent, deux indicateurs et trois enquêteurs de l’Ofast Marseille ont déjà été mis en examen, dont deux placés en détention provisoire. Seul le capitaine, le chef de groupe, a été laissé sous contrôle judiciaire contre l’avis du parquet de Paris.
Le fiasco de l’opération Trident
À l’origine, une opération prometteuse baptisée « Trident ». L’Ofast Marseille reçoit en 2023 un tuyau de l’un de leurs indicateurs, corroboré par la DEA, l’agence anti-drogue américaine. Deux conteneurs contenant près de 200 kilos de cocaïne dissimulés dans des cargaisons de bananes doivent débarquer au port de Marseille en provenance de Carthagène (Colombie) avant de transiter vers la région parisienne. Avec l’accord des magistrats marseillais, une « livraison surveillée » une technique d’enquête policière visant à laisser entrer de la drogue sur le territoire français pour identifier les trafiquants et démanteler le réseau d’importation, est mise en place.
Parmi la centaine d’enquêteurs qui composent l’antenne marseillaise de l’Ofast, c’est le groupe 8, l’un de ceux chargés de réprimer le trafic international de drogue et celui qui a été destinataire de l’information, qui est chargé de monter l’opération. Pour les enquêteurs, il est évident qu’une telle quantité de poudre blanche va susciter la convoitise de Mohamed Djeha, dit « Mimo de la Castellane », l’une des cibles prioritaires de l’Ofast, alors en cavale.
Mais pour des raisons énigmatiques, l’opération tourne à la débâcle. Les informations transmises à la justice sont erronées : le chargement contient 400 kilos, le double de ce qui était annoncé. Ensuite, personne ne vient récupérer la marchandise. La drogue est stockée à l’arrière d’un utilitaire, abandonné de parking en parking à Marseille. « Mimo » ne mord pas à l’hameçon. Comme si l’opération policière avait été éventée et que le baron de la drogue avait senti le piège.
Malgré cet échec, les enquêteurs vont se fourvoyer en sollicitant leurs indicateurs dans l’espoir d’écouler les 400 kilos auprès d’autres réseaux de narcotrafiquants susceptibles d’être démantelés. Des dealers viennent alors se servir en petites quantités dans la camionnette, mais aucun narcotrafiquant d’ampleur n’est identifié. Et lorsque les enquêteurs se décident - enfin - à perquisitionner l’utilitaire après des mois de surveillances guère assidues, c’est la stupéfaction : il ne reste plus… qu’un pain contenant 1 kilo de cocaïne. Les 399 autres kilos ont purement et simplement disparu.
De graves dissensions
Comment expliquer un tel fiasco ? Les fonctionnaires ont-ils perdu le fil en voulant réaliser le coup d’une carrière ? Ou cette opération recèle-t-elle des mobiles moins avouables ? Des soupçons de corruption sont apparus, avec le témoignage d’un serrurier de l’Ofast Marseille. Employé par le service comme homme à tout faire - crochetage de serrures, pose de caméras... -, il a confié ses doutes quant à la probité de certains enquêteurs de l’Ofast Marseille, en particulier du groupe 8. Il a affirmé avoir vu l’un d’eux manipuler un sac d’argent et même avoir réalisé des actions hors cadre de toute procédure judiciaire pour le service. Début 2024, une enquête judiciaire est ouverte, d’abord à Marseille avant d’être dépaysée à la Junalco à Paris.
Les investigations s’accélèrent et remontent petit à petit la chaîne hiérarchique de l’antenne marseillaise de l’Ofast. Trois enquêteurs du groupe 8 - le capitaine-chef, son adjoint major et un brigadier-chef - sont d’abord mis en examen entre avril et le mois de juin 2025. Et désormais, les policiers de l’IGPN veulent savoir si les commissaires à la tête de l’Ofast Marseille avaient connaissance de la tournure inquiétante de l’opération Trident, voire s’ils ont donné des ordres en faveur de la poursuite de la livraison surveillée. Et plus généralement s’ils avaient connaissance des agissements douteux de leurs enquêteurs.
Plusieurs policiers du groupe 8 mis en examen ont en tout cas assuré avoir agi avec l’aval de leurs chefs. L’enquête révèle de graves dissensions au sein de l’antenne marseillaise sur la conduite de l’opération Trident mais aussi avec l’échelon central de l’Ofast de Nanterre, où des effectifs ont été dépêchés en renfort avant de rentrer à Paris en constatant le fiasco sur le terrain.
Signe de l’ambiance exécrable, l’un des commissaires placés en garde à vue ce lundi avait rédigé un rapport faisant état de ses soupçons de corruption au sein de ses propres effectifs. Au point, selon Le Monde, d’avoir demandé au serrurier du service d’installer des caméras clandestines dans son bureau... Les enquêteurs de l’IGPN disposent de 96 heures de garde à vue pour lever le mystère sur les dessous de ce qui ressemble au plus grand scandale policier depuis la création de l’Ofast, pourtant créé en 2020 afin de solder les errements passés de son ancêtre, l’Octris.
L’Humanité : Affaire des 400 kilos de cocaïne disparus : les patrons de l’office antistups de Marseille mis en examen
400 kilos de cocaïne envolés et des soupçons qui se précisent. La cheffe de l’Office anti-stupéfiants (Ofast) de Marseille et son adjoint ont été mis en examen à Paris dans le cadre de l’enquête sur une livraison surveillée en 2023 de cocaïne, une opération nommée Trident suspectée d’avoir connu de graves dérives.
Ces commissaires ont été mis en examen, respectivement mercredi 25 et jeudi 26 juin, par les juges d’instruction de la Juridiction nationale de lutte contre la criminalité organisée (Junalco), notamment pour « complicité de faux en écriture publique par une personne dépositaire de l’autorité publique » et « violation du secret d’une enquête portant sur la criminalité organisée », a indiqué le parquet de Paris, confirmant à l’AFP une information de sources proches du dossier. Les deux hauts gradés sont aussi mis en examen pour « complicité d’atteinte à l’intimité par captation d’images et de paroles », selon le ministère public.
Trois policiers précédemment mis en examen
Les investigations initiales dans ce dossier, parties d’un renseignement anonyme en février 2023, portaient sur une arrivée de cocaïne au port de Marseille en container depuis la Colombie et à destination de la région parisienne. Sauf qu’il s’est « avéré que cette livraison a permis l’entrée sur le territoire de près de 400 kg de cocaïne », selon le parquet. L’enquête de la Junalco a ensuite révélé, selon le ministère public, de possibles « échanges entre des policiers et d’autres personnes, portant sur la cession d’au moins 360 kg de cocaïne, en dehors de tout contrôle hiérarchique, et sur la dissimulation des quantités réelles arrivées sur le territoire ».
En avril, deux policiers de l’Ofast de Marseille avaient déjà été mis en examen, puis placés en détention provisoire, eux pour trafic de stupéfiants en bande organisée, blanchiment ou encore association de malfaiteurs. Puis en juin, un autre avait à son tour été mis en examen.
Pour l’avocat de la cheffe de l’Ofast, Me Louis Cailliez, la garde à vue cette semaine de sa cliente a « permis de lever les doutes sur l’absence de connaissance (et donc de validation) hiérarchique du déroulement réel du dossier Trident », rapporte l’AFP. « Tel est également le cas de certaines pratiques de ses effectifs, combattues et dénoncées par elle, et pour lesquelles elle a pourtant été mise en examen », a insisté le conseil qui souligne que la commissaire « n’est ni mise en examen pour corruption, ni (…) pour trafic de cocaïne, ni (…) pour importation de stupéfiants en bande organisée ».
« Avec ma consœur, Marie Cornanguer, nous nous réjouissions de la légitime mise hors de cause du commissaire X du cœur de ce dossier concernant des faits de trafic de stupéfiants », a réagi de son côté auprès de l’AFP Me Vanessa Bousardo, avocate de l’adjoint. « Sa mise en examen résiduelle alors même qu’il est l’auteur du signalement à l’origine de cette procédure sera contestée par toutes les voies de droit à notre disposition. Une telle mise en cause adresse d’ailleurs un très mauvais signal aux lanceurs d’alerte », a-t-elle estimé annonçant son intention de déposer une requête en nullité.
Libération : 400 kilos de cocaïne disparus : les deux patrons de l’antistup de Marseille mis en examen
La cheffe de l’office antistupéfiants (Ofast) de Marseille et son adjoint sont poursuivis après le fiasco de l’opération « Trident » au printemps 2023, qui a abouti à la disparition dans la nature d’une cargaison de drogue sous surveillance.
Plusieurs charges sont retenues contre eux. « Complicité de faux en écriture publique par une personne dépositaire de l’autorité publique », « violation du secret d’une enquête portant sur la criminalité organisée » et « complicité d’atteinte à l’intimité par captation d’images et de paroles ». La cheffe de l’office antistupéfiants (Ofast) de Marseille et son adjoint ont été mis en examen, a fait savoir ce jeudi 26 juin le parquet de Paris.
L’affaire date de 2023. Elle commence par un tuyau reçu par l’Ofast concernant l’arrivée prochaine au port de Marseille d’une cargaison de cocaïne en provenance de Colombie, cachée au milieu de bananes importées. Les policiers montent alors une livraison surveillée, baptisée « opération Trident ». Le but : laisser entrer la drogue plutôt que de la saisir afin de pouvoir démanteler le réseau qui la réceptionne. En l’occurrence, Mohamed Djeha, alias « Mimo », chef présumé du réseau de drogues de la Castellane. Sauf qu’une fois les conteneurs arrivés à destination, le fiasco commence. Les près de 400 kilos de cocaïne de la cargaison s’envolent, sans qu’aucun réseau ne soit identifié derrière.
Depuis, la justice remonte la hiérarchie des responsabilités. En avril, deux policiers de l’Ofast de Marseille avaient déjà été mis en examen, puis placés en détention provisoire, eux pour trafic de stupéfiants en bande organisée, blanchiment ou encore association de malfaiteurs. Puis en juin, un autre avait aussi été mis en examen. L’enquête dirigée par la Juridiction nationale de lutte contre la criminalité organisée (Junalco) a révélé, selon le ministère public, de possibles « échanges entre des policiers et d’autres personnes, portant sur la cession d’au moins 360 kg de cocaïne, en dehors de tout contrôle hiérarchique, et sur la dissimulation des quantités réelles arrivées sur le territoire ».
Ce jeudi, les juges d’instruction de la Junalco ont donc mis en examen deux commissaires. « Ils ont été placés sous contrôle judiciaire avec interdiction d’exercer des fonctions et missions de police judiciaire, de se rendre dans tous les locaux de police des Bouches-du-Rhône, interdiction d’entrer en relation avec d’autres personnes apparaissant dans le dossier », précise le ministère public.
« Un très mauvais signal adressé aux lanceurs d’alerte »
Louis Cailliez, avocat de la cheffe de l’Ofast, souligne que sa cliente « n’est ni mise en examen pour corruption, ni […] pour trafic de cocaïne, ni […] pour importation de stupéfiants en bande organisée ». Selon lui, « elle conteste vigoureusement toute infraction pénale de sa part et défendra son honneur et sa probité en dépit des tentatives d’instrumentalisation de ce dossier ».
Pour Me Cailliez, la garde à vue cette semaine de la cheffe de l’Ofast « a permis de lever les doutes sur l’absence de connaissance (et donc de validation) hiérarchique du déroulement réel du dossier Trident », nom de l’opération de livraison de cocaïne surveillée dans le viseur de la justice. « Tel est également le cas de certaines pratiques de ses effectifs, combattues et dénoncées par elle, et pour lesquelles elle a pourtant été mise en examen », a-t-il insisté.
De même, Maître Vanessa Bousardo, avocate de l’adjoint, se réjouit « de la légitime mise hors de cause du commissaire X du cœur de ce dossier concernant des faits de trafic de stupéfiants ». Elle souligne que son client « est l’auteur du signalement à l’origine de cette procédure » et assure vouloir contester la procédure. « Une requête en nullité sera déposée prochainement à l’encontre de sa mise en examen et des irrégularités relevées », précise-t-elle. « Une telle mise en cause adresse d’ailleurs un très mauvais signal aux lanceurs d’alerte », a-t-elle aussi estimé.