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Dépénaliser, une urgence pour le respect des Droits humains fondamentaux

La France toujours en retard s’oppose à la légalisation

Conseil des droits de l’homme

Cinquante-quatrième session

11 septembre-6 octobre 2023

Point 3 de l’ordre du jour

Promotion et protection de tous les droits de l’homme, civils, politiques, économiques, sociaux et culturels, y compris le droit au développement

Enjeux en matière de droits de l’homme de la mobilisation et de la lutte contre le problème mondial de la drogue sous tous ses aspects

Rapport du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme*

Pour télécharger le rapport (plusieurs langues disponibles) : https://undocs.org/Home/Mobile?FinalSymbol=A%2FHRC%2F54%2F53&Language=E&DeviceType=Desktop&LangRequested=False

Extraits du Rapport

(...)

En 2019, le HCDH, ONUSIDA, le PNUD et l’OMS ont publié les Directives internationales relatives aux droits de l’homme et aux politiques en matière de drogue, avec la contribution de l’ONUDC et en concertation avec les communautés et les experts. [1]

56. Conscients des effets qu’ont les politiques répressives en matière de drogue sur les droits de l’homme, les mécanismes internationaux relatifs aux droits de l’homme ont adressé des recommandations progressives aux États pour qu’ils mettent la santé publique et les droits de l’homme au centre de leurs politiques en matière de drogue, notamment en dépénalisant la possession de drogues à usage personnel et en proposant des services de réduction des risques [2]. Par ailleurs, les membres du système des Nations Unies appellent dans leur position commune sur les questions relatives aux drogues à la dépénalisation de la possession de drogues à usage personnel [3], et l’Organe international de contrôle des stupéfiants a estimé que la dépénalisation était conforme aux conventions des Nations Unies relatives au contrôle des drogues [4]
.

57. Si elle est conçue et appliquée de manière efficace, la dépénalisation peut être un. instrument puissant de protection des droits des consommateurs de drogues. Au Portugal, par exemple, la mise en place de réponses intégrées dans le cadre de la dépénalisation de la consommation personnelle et de la possession de drogues à usage personnel a permis de faire baisser la consommation de drogues, notamment chez les adolescents, et de réduire
sensiblement le nombre de surdoses et d’infections au VIH chez consommateurs de drogue par injection [5].

58. Plusieurs pays ont récemment pris des mesures en faveur de la dépénalisation de la consommation et de la possession de drogues ainsi que de la mise en place de peines de substitution à l’incarcération. Des débats sur la dépénalisation sont en cours en Tchéquie, dans le but de réglementer les substances addictives en fonction de leur nocivité [6].

V. Conclusions et recommandations

64. Le problème mondial de la drogue a d’importantes répercussions sur l’exercice des droits de l’homme. Remédier aux dommages causés par l’usage de drogues et le commerce illicite de drogues est un enjeu fondamental de l’action publique contemporaine, dont tous les aspects ont une incidence sur les droits de l’homme. Les principaux sujets de préoccupation dans le cadre de la lutte contre le problème mondial de la drogue sont le manque de traitements et de programmes de réduction des risques et les inégalités d’accès à ces derniers, la « guerre contre les drogues » et la militarisation du contrôle des drogues, le recours excessif à l’incarcération et la surpopulation carcérale, l’imposition de la peine de mort pour des infractions liées à la drogue et les effets disproportionnés des politiques répressives en matière de drogue sur les jeunes, les personnes d’ascendance africaine, les personnes autochtones et les femmes.

(...)

68. Conformes aux Directives internationales relatives aux droits de l’homme et aux politiques en matière de drogue, les recommandations qui suivent aideront les États et les parties intéressées à élaborer des politiques en matière de drogue efficaces et fondées sur les droits de l’homme :

a) Adopter des mesures de substitution à la criminalisation, à la « tolérance zéro » et à l’élimination des drogues, en envisageant de dépénaliser la consommation, et contrôler les marchés des drogues illicites grâce à une réglementation responsable, dans le but d’éliminer les profits tirés du trafic et de la criminalité et obtenus par la violence ;

b) En cas de dépénalisation, réexaminer les condamnations et les peines et, le cas échéant, les annuler, les commuer ou les réduire ;

c) Envisager l’élaboration d’un système de réglementation de l’accès légal à
toutes les substances soumises à contrôle ;

d) En l’absence de dépénalisation, veiller à ce que les infractions soient
clairement définies dans la loi et à ce que les peines soient proportionnées à la gravité des faits et tiennent compte de circonstances atténuantes ou aggravantes ;

(...)

u) Inclure des informations relatives aux politiques en matière de drogue
dans les rapports destinés aux mécanismes relatifs aux droits de l’homme et dans les rapports sur la réalisation des objectifs de développement durable, appliquer les recommandations de ces mécanismes et veiller à la prise en compte systématique de la question des droits de l’homme dans les travaux des mécanismes internationaux de contrôle des drogues ;

v) Dans la perspective de l’examen à mi-parcours de la Déclaration
ministérielle de 2019 sur les défis persistants et nouveaux liés au problème mondial de la drogue qui aura lieu en 2024, faire le bilan des résultats obtenus jusqu’alors et définir la voie à suivre en prévoyant les problématiques que devront prendre en considération les politiques en matière de drogue à l’horizon 2029 et comment garantir la protection des droits de l’homme et contribuer efficacement au Programme 2030.


A/s- Drogues- Rapport du Haut-Commissariat aux droits de l’Homme des Nations Unies
- Contribution de la France

Aux côtés de l’Union européenne, la France continue à promouvoir le respect des droits de l’Homme dans la mise en œuvre des politiques en matière de drogues, en particulier l’abolition de la peine de mort en tous lieux et toutes circonstances, le droit à un procès équitable, la protection des enfants et autres groupes vulnérables et/ou isolés, le droit à la santé physique et mentale de toute la population et notamment des jeunes, ainsi que le droit à la sécurité. La France promeut l’intégration de la dimension du genre dans tous les aspects des politiques en matière de drogue, ainsi que la prévention et la lutte contre la stigmatisation et la discrimination des usagers de drogue. Plus largement, la France soutient la meilleure connaissance des instruments relatifs aux droits de l’Homme et la nécessité de les mettre en œuvre en s’appuyant sur le cadre multilatéral et la coopération internationale.
La protection de la santé, qui passe aussi par la formation des personnels de santé, doit inclure les mesures de prévention précoce de l’usage de drogues, fondées sur la recherche scientifique, les données factuelles avérées et les bonnes pratiques (en particulier en ce qui concerne les populations les plus jeunes), les mesures de réhabilitation, l’accès aux soins abordables, sûrs et de qualité, notamment pour les infections sexuellement transmissibles (IST) résultant de la consommation de drogues. Elle doit également inclure l’accompagnement pour les usagers de drogues avec des mesures de réduction des risques et des dommages pour tous les usagers de drogues, y compris en détention. La réduction de la disponibilité des substances et donc la lutte contre toutes les formes de trafics de drogues et la criminalité corrélée sont également essentielles dans une approche équilibrée et globale.
La France soutient la reconnaissance des conséquences environnementales dues à la production et au commerce des drogues et plaide pour la prise en compte de ces atteintes à l’environnement en matière de protection des droits de l’Homme, en particulier des communautés affectées.

S’appuyant sur un cadre juridique renforcé au fil des années, la France met en œuvre des alternatives aux sanctions coercitives, telles que l’amende forfaitaire délictuelle, l’orientation vers une structure sanitaire, sociale ou professionnelle, et l’injonction thérapeutique. Elle met également en œuvre des mesures ambitieuses de réduction des risques et des dommages.

L’une des particularités de la France est l’assurance de la gratuité et de l’anonymat dans le système médico-social. C’est le cas par exemple de deux dispositifs clefs du système de traitement des addictions que sont les Centres de Soins, d’Accompagnement et de Prévention en Addictologie (CSAPA) et les Centres d’Accueil et d’Accompagnement à la Réduction des risques pour Usagers de Drogues (CAARUD), qui sont présents sur l’ensemble du territoire français. C’est également le cas pour les « haltes soins addictions », précédemment appelées « salles de consommation à moindre risque ».

Il existe aussi des dispositifs permettant de suivre au mieux les consommateurs de drogues, notamment grâce à des appartements thérapeutiques dans les CSAPA ou à des initiatives telles qu’ « Un chez soi d’abord » qui permet aux sans-abris souffrant d’addictions de bénéficier d’un logement.

La France porte également le sujet des droits de l’Homme dans la mise en œuvre des politiques en matière de drogues aux niveaux européen et international, tant au plan politique qu’à travers ses contributions financières

(mise en œuvre des recommandations de la session extraordinaire de l’Assemblée générale des Nations Unies de 2016 sur le problème mondial des drogues qui mettent l’accent sur les droits de l’Homme, Fonds mondial contre le sida, la tuberculose et le paludisme, partenariats avec la société civile pour promouvoir l’accès à la santé et aux droits des populations vulnérables par la promotion et la diffusion de programmes pilotes de réduction des risques et de santé sexuelle reproductive)

.

Il s’agit d’un sujet qui relève de la compétence des Etats membres. A ce titre, conformément au droit de l’Union européenne et aux conventions internationales pertinentes [7], la France n’est pas favorable à des initiatives visant à promouvoir la légalisation.

 Lien utile pour plus de détails sur l’approche française : https://rm.coe.int/people-
who-use-drugs-web-en/1680a94908 (pp 51-55)

Voir en ligne : Communiqué de Presse


[1https://www.humanrights-drugpolicy.org/site/assets/files/1640/hrdp_guidelines_2020_english.pdf.
Voir également la contribution de l’International Centre on Human Rights and Drug Policy, University of Essex.

[3CEB/2018/2, annexe I.

[5Contribution du Portugal.

[6Contribution de la Tchéquie.

[7- Décision-cadre 2004/757/JAI sur l’établissement des dispositions minimales relatives aux éléments constitutifs des infractions pénales et des sanctions applicables dans le domaine du trafic de drogue ;
- Convention de Schengen, article 71 ;
- Convention unique des Nations Unies sur les stupéfiants (1961).

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