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Cannabis médical : la "guerre aux malades" peut continuer

La "guerre aux malades" peut continuer.

Un article de l’Est Républicain du 28 septembre 2022, nous informe qu’à Verdun, la "Guerre à la drogue" du sinistre Darmanin ne ménage pas ses efforts pour ruiner la vie des gens catalogués dans les rubriques "Faits divers - Justice ; Crime, délit et contravention".

Le prévenu est-il malade ou dealer de cannabis ?

Souffrant d’une pathologie psychiatrique avérée, un trentenaire avait l’habitude de consommer du cannabis pour chasser ses idées noires. Mais les gendarmes ont découvert plus de 50 grammes de résine à son domicile, ce qui l’a conduit devant le tribunal.

Thibaut* a une trentaine d’années. Une pathologie psychiatrique lui a été diagnostiquée en 2012. Mais, faute de traitement efficace, il fume du cannabis « quand ça ne va pas ». Jusqu’à trois grammes par jour. C’est pourquoi il a lâché 350 € pour acheter 100 grammes de shit, en octobre 2021.

En avril dernier, les gendarmes mettent la main sur le reliquat, soit 52,4 g. En garde à vue, il déclare que cela ne lui appartient pas. Mais,...

Mais qui est la victime ? Où est le crime ou est le délit commis par une personne qui soulage ses pathologies ?

On se demande bien pourquoi il y a tant de réticence à faire avancer le droit d’accès au cannabis médical, parfaitement soutenu par les conventions internationales mais encore restreint par les dispositions légales en France.

Enfumage

Comme le soulevait le quotidien Libération le 26 septembre, en guise d’avertissement au gouvernement, il y a bien de l’enfumage. Un brouillard que la DGS expliquait ainsi :

« On est dans l’anticipation et en cas de prolongation de l’expérimentation, on discute avec les différents laboratoires pour qu’il n’y ait pas de rupture d’alimentation dans les médicaments. Le sujet est toujours en discussion en interministériel et le débat se fera dans le cadre du PLFSS au parlement. Notre objectif n’était pas de décréter les choses », affirme la DGS.

Une situation intolérable au regard des patientEs (impatientEs), à la lecture du communiqué de presse du 28 septembre de l’association Principes Actifs qui réagissait pour expliciter leur point de vue.

Les patients sont en droit de se demander pourquoi ces points n’ont pas été réglés plus tôt. Comment est-il possible que rien de pérenne n’ait été statué sur le circuit de prescription et le remboursement des médicaments par l’Assurance Maladie, alors qu’il s’agissait de l’objet de l’expérimentation ?

Nous rappelons que cette expérimentation n’avait pas pour objectif de prouver la pertinence des traitements médicaux à base de cannabis. Plus de 1 800 patients ont été inclus depuis mars 2021 et une large majorité (70 %) d’entre eux ont témoigné d’une incontestable amélioration de leur état.

Cependant, des dizaines de milliers de patients français atteints de pathologies aux symptômes sévères et invalidants continuent de souffrir en attendant un accès aux médicaments à base de cannabis. Prétexter que la filière française de production n’est pas prête n’est en aucun cas l’affaire des patients. De surcroît, privilégier les intérêts économiques aux exigences de santé publique est immoral et indécent.

Une prolongation de l’expérimentation n’est ni acceptable, ni supportable pour les malades. Les décisions administratives doivent être prises dans les mois qui viennent et d’ici la fin de l’expérimentation initialement prévue fin mars 2023. Nous réclamons que les médicaments à base de cannabis soient mis à disposition dès le second trimestre 2023 comme annoncé initialement, et ce, dans l’intérêt des patients en souffrance.

Le 26 octobre 2022, le parlement européen rencontrera des personnalités et institutions au sujet de leur appel à une politique commune de régulation du cannabis (récréatif, médical et production). Une dizaine de pays européens ont choisi de changer de politique quant à l’usage du cannabis médical. Les instances françaises, une fois de plus à la traîne, devraient avoir le bon sens de s’inspirer de leurs voisins européens.

Prolongation de l’expérimentation

Enfin le Ministe de la Santé, M. François Braun, a levé une partie des incertitudes lors de son audition à la Commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale en affirmant la prolongation de l’expérimentation de la faisabilité de la mise à disposition du cannabis médical.

Une déclaration qui a fait réagir l’association Santé France Cannabis, créée en avril 2021 en rassemblant les acteurs de la future filière française qui souligne plusieurs aspects des négociations en cours :

Dans un contexte marqué par la gestion de la crise sanitaire, les deux arrêtés qui doivent compléter le décret en Conseil d’État publié en février dernier en vue de permettre la culture du cannabis médical en France et la production de médicaments n’ont pas encore été publiés. En l’absence d’un cadre clair, une telle situation risque de conduire les acteurs pharmaceutiques nationaux à remettre en question leurs investissements dans la recherche autour des médicaments à base de cannabis.

Santé France Cannabis déplore que les conditions ne semblent pas réunies à l’heure actuelle pour permettre un accès des patients aux médicaments à base de cannabis.

. Pour en savoir plus sur Santé France Cannabis.

Et pourtant, ça avance

Plutôt que de tergiverser, le gouvernement et toutes les autorités concernées feraient mieux de lire, analyser et apprendre des travaux des parlementaires de la précédente mandature [1] qui déposaient le 21 juin 2021 un rapport relatif à "la réglementation et à l’impact des différents usages du cannabis". Sur cette question particulière de l’accès au cannabis médical, ils avaient déjà bien cernés l’ensemble des problèmes et solutions à envisager en résumant leurs propositions en page 25.

Lors d’un passage sur le plateau de l’émission sur France 5 "Le Mag de la santé", le Pr Authier a révélé certains aspects de l’expérimentation en cours.

Comme par exemple, cette étude clinique engagée par le Dr Grégoire Cleirecet le Dr Pierre Poloméni, qui dans un article publié en 2019 sur le site VIH.org, mettent en évidence certaines de leurs expérimentations.

Une récente étude de phase I n’a pas retrouvé de répercussion somatique ou psychique inquiétante à court terme lors de l’administration de 1 500 à 6 000 mg de CBD par jour à des sujets sains6. Contrairement au THC, il ne semble pas avoir d’effet récréatif ou hédonique. Aucun argument n’a été rapporté jusqu’à présent pour un potentiel addictogène dans les modèles animaux ou chez l’humain, et aucun cas de mésusage de CBD n’a été rapporté. Un rapport récent de l’OMS (Organisation mondiale de la santé) concluait à un bon profil de sécurité du CBD.

et d’ajouter en conclusion :

Nous travaillons actuellement à l’étude pilote CANNAVAP, qui devrait voir le jour en 2019. Le but de cette étude est d’évaluer l’efficacité du CBD inhalé par cigarette électronique dans la réduction de consommation de cannabis. Elle concernera dix usagers de cannabis désireux de réduire ou d’arrêter leur consommation pendant une période de trois mois. Des cigarettes électroniques et du e-liquide comportant du CBD (à plusieurs concentrations) leur seront fournis en Csapa.

Ne pas se laisser abattre

Il serait tellement plus simple de faire preuve d’intelligence (les parlementaires français sauront-ils avoir "De l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace" ?) en prenant pour acquis les expérimentations à l’étranger, comme par exemple de faciliter l’implication des autoproducteurs qui dans l’immédiat sont persécutés par la police au titre de la lutte contre le trafic de drogues (sic).

Alors que par leur acte de désobéissance civile, ces "El Chapo de paille", "jardiniers en herbe qui fait rire" cherchent d’abord à ne plus avoir de lien avec le marché noir, et contribuent parfois par solidarité à petite échelle à aider des proches qui se soulagent grâce à leur production généreusement partagée).

Mais il est évident que si la politique de Santé publique en France est définie et validée par le seul ministère de l’Intérieur, il y a fort à parier que l’on n’est pas prêt de voir pris en compte l’intérêt des malades et de la société entière.


[1LISTE DES PROPOSITIONS
– Publier le décret permettant le lancement de l’expérimentation et éviter
tout nouveau report ;
– Afin d’en garantir le déroulement impartial, renoncer à la gratuité et
définir le budget nécessaire à la réalisation de l’expérimentation ;
– Stimuler le dialogue interministériel afin de permettre le développement
d’une filière entièrement française du cannabis thérapeutique ;
– Inscrire dans le code de la santé publique la possibilité de produire,
transporter, fabriquer, importer, exporter, détenir, offrir, céder, acquérir et employer l’ensemble de la plante de cannabis ainsi que de variétés contenant plus de 0,2 % de THC afin de permettre, dans un cadre fixé par décret, de fournir des traitements à base de cannabis aux patients souffrant d’une liste de pathologie également fixée par décret ;
– Respecter strictement les critères de l’expérimentation initialement
définis par le CSST ;
– Initier dès à présent une réflexion sur le statut des différents produits du
cannabis thérapeutique afin de garantir que ces traitements puissent s’inscrire dans le cadre d’un parcours permettant leur remboursement ;
– Entamer une réflexion sur l’élargissement de la possibilité de prescrire du
cannabis thérapeutique dans le cadre d’autres pathologies que celles retenues pour l’expérimentation ;
– Inclure dans les orientations pluriannuelles prioritaires de développement
professionnel continu la prescription du cannabis et l’accompagnement des patients et étendre à l’ensemble des personnels soignants les efforts de formation destinés actuellement aux seuls médecins ;
– Confier à un organe public la régulation du cannabis thérapeutique, chargé
du contrôle de la culture, de la qualité, de la transformation et du stockage des produits ;
– Renforcer la recherche sur les effets du THC sur les facultés des consommateurs afin de développer des tests adaptés et de fixer un seuil au-dessous duquel, pour les patients consommant du cannabis dans un cadre thérapeutique légal, la conduite automobile peut être autorisée.

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