Drogues : des élus appellent le gouvernement à pérenniser les « salles de consommation à moindre risque » par une loi
Lors d’une conférence de presse au Sénat, plusieurs élus locaux et nationaux ont appelé l’Etat à se saisir de la question des Haltes Soins Addictions (HSA), ces salles de consommation et de soins pour toxicomanes, dont l’expérimentation en France doit se finir en décembre 2025.
« Il y a urgence ». La sénatrice écologiste Anne Souyris a interpellé le gouvernement lors d’une conférence de presse ce lundi, sur l’avenir des salles de consommation et de soins pour toxicomanes en France, appelées Haltes Soins Addictions. Si deux « salles de shoot » existent à Paris et à Strasbourg, la parlementaire, accompagnée d’élus locaux comme l’ancienne maire et actuelle première adjointe de la ville de Marseille Michèle Rubirola, la maire du Xe arrondissement de Paris Alexandra Cordebard, ou encore l’adjoint de la maire de Strasbourg Alexandre Feltz, a appelé à la pérennisation du dispositif par une loi, alors que son expérimentation se termine cette année.
« C’est le moment où l’Etat doit prendre ses responsabilités », appelle la sénatrice Anne Souyris
Depuis 2016, ces salles permettent aux toxicomanes de consommer de façon « safe » en intérieur, selon les mots d’Alexandre Feltz, mais également de soigner les personnes addictes. En effet, des médecins, infirmiers ou encore assistants sociaux les prennent en charge pour les sortir de la drogue, et accompagner la guérison. A Paris, la maire du Xe arrondissement accueillant un de ces centres, Alexandra Cordebard, parle de 80 000 consommations par an, mais également de 3 000 consultations médicales et 1 200 consultations sociales l’année dernière.
Les élus souhaitent ici mettre en lumière le « pilier sanitaire » des politiques publiques en matière de drogue. En effet, si l’Etat et les parlementaires se saisissent déjà du pilier « répressif », la « balance santé » semble être mise de côté, toujours d’après l’adjoint à la maire de Strasbourg. Les élus font notamment référence à l’adoption de la proposition de loi sénatoriale visant à sortir la France du piège du narcotrafic, adoptée en commission mixte paritaire le 28 avril dernier. Pour les élus, les deux versants doivent coexister.
Au-delà du pilier sanitaire, les Haltes Soins Addictions ont également une « utilité publique », pour la maire du Xe arrondissement de Paris. Ces 80 000 consommations par an se déroulent en intérieur, et non « dans les rues » de la capitale. Selon l’édile, le nombre de seringues ramassées a également été divisé par 10 entre 2017 et 2024. Ces salles sont « acceptées par la population », affirme-t-elle, et les riverains s’inquiètent de la fermeture du centre d’ici la fin de l’année.
Que répond l’Etat ?
Au-delà des élus, les associations craignent également la fin de l’expérimentation. En avril dernier, Médecins du monde et la Fédération Addiction ont annoncé attaquer l’Etat en justice pour dénoncer son « inaction » face à la nécessité d’une « mise en place d’une politique de réduction des risques ». Une action à laquelle se sont associés les élus lors de la conférence de presse, ce lundi. Pour Anne Souyris, il s’agit de dépasser l’aspect « idéologique » et agir de façon pragmatique pour prévenir les risques en matière de drogue. Le colloque organisé cet après-midi au Sénat se voulait transpartisan : le député Ensemble pour la République Ludovic Mendes y participe notamment.
Interpellé au Sénat le 29 avril dernier par le sénateur socialiste Rémi Féraud, le ministre chargé de la Santé, Yannick Neuder a donné « rendez-vous au mois de juin », pour connaitre l’issue des Haltes soins addictions. En effet, un rapport doit être remis au Parlement « six mois avant précédant la fin de l’expérimentation », qui permettra au gouvernement de répondre à la question de la pérennisation de ces salles. De son côté, le ministre reste favorable au maintien de ces centres.
Mais les élus souhaitent aller plus loin. Au-delà de la pérennisation, ils aimeraient développer ces salles de consommation partout en France, comme c’est le cas dans le reste de l’Europe, notamment en Suisse, ou en Allemagne. La députée socialiste Anna Pic a notamment déposé une proposition de loi visant à pérenniser les Haltes soins addictions, le 17 avril dernier. Lors de la conférence de presse, la sénatrice écologiste Anne Souyris a précisé que les sénateurs proposeront une résolution allant « dans le même sens ». Néanmoins, les élus appellent surtout à un projet de loi porté par Yannick Neuder et la ministre du Travail et de la Santé, Catherine Vautrin.
Pour aller plus loin : https://mairie10.paris.fr/pages/salle-de-consommation-a-moindre-risque-14415
Voir en ligne : Le site Public Sénat