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Drogues en prison

Le député Wulfranc (NUPES) demande au Ministère de la Justice quelles initiatives il entend prendre pour tenter de juguler et de traiter plus efficacement cette problématique "Drogues en prison"

16ème législature

Question écrite N° 300 de M. Hubert Wulfranc (Gauche démocrate et républicaine - NUPES - Seine-Maritime )

Ministère interrogé > Justice Ministère
Rubrique > lieux de privation de liberté

Titre > Lutte contre le trafic et la consommation de drogues en milieu carcéral.

Question publiée au JO le : 26/07/2022 page : 3540

M. Hubert Wulfranc interroge M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la problématique de l’usage de drogues en milieu carcéral, en particulier de drogues dures pouvant notamment conduire au décès du consommateur.

Le 3 avril 2022 un homme de 31 ans est ainsi décédé à la maison d’arrêt d’Evreux, vraisemblablement à la suite d’une overdose survenue dans sa cellule où il était incarcéré avec deux autres détenus.

Entré dans la maison d’arrêt d’Evreux en janvier 2022 pour y purger une peine de 5 ans, ce jeune homme, père d’un enfant, y est décédé après moins de quatre mois d’emprisonnement.

Ce décès illustre la problématique de la grande perméabilité des établissements pénitentiaires à l’entrée et à la consommation des drogues en leur sein.

Selon la note Théma « Usages des drogues en prison. Pratiques, conséquences et réponses » publiée en décembre 2019 par l’observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT), la consommation de drogues en milieu carcéral atteint des niveaux bien supérieurs à la moyenne nationale. Ainsi, une enquête réalisée dans les établissements de Lyon, Corbas et de Liancourt témoigne d’une consommation de cannabis avoisinant 40 % (dont 16,3 % d’usage quotidien à Liancourt), une consommation de cocaïne variant entre 7 et 10 % et une consommation d’héroïne autour de 8 %.
L’étude portant sur la maison d’arrêt de Lyon et Corbas indique que les consommateurs d’au moins un produit illicite autre que le cannabis, privilégient le sniff à 60 % d’entre eux contre 30 % qui procèdent par injection.

Une analyse des eaux usées effectuée par le laboratoire de pharmacologie de Paris-Sud, en partenariat avec l’OFDT, portant sur trois établissements pénitentiaires a démontré une forte présence de THC, marqueur de la consommation de cannabis, correspondant à la consommation de 2,7 joints par jour et par personne soit des niveaux 10 à 20 fois plus élevés qu’en population générale. Les autres produits détectés, en moindres quantités sont la cocaïne, la MDMA, la morphine, l’EDDP marqueur de méthadone et le buprénorphine.

Selon cette analyse, les quantités consommées estimées de cocaïne et de MDMA restent comparables aux niveaux de consommation en population générale.

L’entrée des produits stupéfiants s’effectue principalement à l’occasion des visites des détenus dans les parloirs, par des projections extérieures de colis, ou encore, via l’aide de professionnels ou d’intervenants extérieurs ou d’agents de l’administration pénitentiaire.

La note de l’OFDT indique qu’une certaine permissivité des surveillants, à l’égard de l’usage des stupéfiants par les détenus, est susceptible de s’instaurer dans certaines maisons d’arrêt des grandes agglomérations, du fait de la peur ressentie par les personnels de surveillance au quotidien, pour partie due à la surpopulation. L’ordre en prison pouvant se négocier entre surveillants et détenus, la drogue peut alors jouer un rôle pacificateur.

L’ordre en prison pouvant se négocier entre surveillants et détenus, la drogue peut alors jouer un rôle pacificateur.

Les réponses sanitaires et disciplinaires introduites ces trente dernières années n’ont pas permis de juguler véritablement l’emploi des produits stupéfiants en milieu carcéral.

Les commissions de discipline ne peuvent se réunir, pour des raisons de preuves, que si des détenus sont contrôlés en possession de produits stupéfiants à l’occasion de fouilles des locaux, ou de fouilles corporelles (intégrales ou par palpation).

Le renforcement de la sécurité extérieure des établissements via des mesures architecturales et matérielles permettant de sectoriser les espaces et d’isoler davantage les lieux d’activités de l’extérieur n’ont pas permis de lutter efficacement contre l’introduction de substances ou d’objets interdits en détention selon la note de l’OFDT.

Selon l’enquête Circé réalisée en 2019 citée par l’OFDT, les directions des établissements interrogées affirment être dans l’incapacité de donner suite à l’ensemble des incidents liés à la drogue (consommation, échanges, trafic etc.) tant ces derniers se sont généralisés à leurs yeux. Néanmoins, celles-ci affirment continuer de privilégier les réponses disciplinaires lorsque des produits stupéfiants sont découverts.

La question du rétablissement des fouilles intégrales à l’issue des parloirs est revendiquée de manière constante par les organisations syndicales de surveillants afin de lutter contre l’introduction de produits et de matériels interdits en détention bien qu’elles puissent avoir un impact limité, certains produits pouvant être consommés durant le parloir et d’autres dissimulés in corpore durant celui-ci.

Les réponses apportées à la problématique de l’usage des drogues en milieu carcéral oscillent entre une logique pénitentiaire, dans l’objectif de contrôle des comportements et depuis les années 1990, une logique soignante.

Néanmoins, l’OFDT indique que les personnes incarcérées usagères de drogues ne bénéficient pas à ce jour, d’un égal accès aux soins et aux mêmes types d’interventions qu’en milieu libre. Face à la persistance à un haut niveau de ce fléau en milieu carcéral, il lui demande quelles initiatives il entend prendre pour tenter de juguler et de traiter plus efficacement cette problématique.


Pour compléter : https://www.ofdt.fr/publications/collections/thema/usages-de-drogues-en-prison-pratiques-consequences-et-reponses-thema/


(A SUIVRE)

Voir en ligne : Le site de l’Assemblée Nationale

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