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Un "Joint" à l’Assemblée nationale

Lors de la séance des questions au gouvernement à l’Assemblée nationale mardi 4 avril, François-Michel Lambert, député Libertés et Territoires des Bouches-du-Rhône (13), est intervenu dans l’hémicycle en interpellant le Ministre de l’Intérieur par un discours en faveur de la légalisation du cannabis.

A la fin de sa question, l’élu montre un gobelet en plastique avec une feuille de cannabis imprimée, avant d’extraire un "joint" (une cigarette roulée grossièrement dont on ne connait pas le contenu) du récipient pour le brandir devant ses homologues présents.

L’objet de cette démonstration est évident : la loi française est inique et obsolète, et il est urgent que les députés se chargent de la réformer, avec pragmatisme en s’appuyant sur les travaux en cours de la Mission d’information, pour esquisser les contours d’une nouvelle politique, plus juste et efficace.

Bien plus intéressante est la séquence entière avec la réplique liminaire du député à la réponse totalement démagogique du Ministre de l’Intérieur, à lire ci-dessous.

Extrait du compte rendu Verbatim

Débat national sur la consommation de drogue

M. le président.
La parole est à M. François-Michel Lambert.

M. François-Michel Lambert.
Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur.
Le Président de la République a annoncé un grand débat national sur la consommation de drogue. Ce débat est nécessaire : notre pays compte 5 millions de consommateurs de cannabis, dont 1 million de consommateurs quotidiens. Cette consommation a des conséquences importantes sur la santé publique, notamment parce que les dealers vendent des produits frelatés. Elle est également une source d’insécurité. Pourtant, la seule réponse est une politique de prohibition. Le tout-répressif est un échec total. D’autres pays ont fait le choix d’une politique de légalisation, comme les États-Unis ou le Luxembourg ; ils ont fait le choix d’affronter le problème plutôt que la politique de l’autruche.
Demain, une mission parlementaire d’information sur le cannabis rendra son rapport, lequel défendra la légalisation contrôlée du cannabis. Je salue mes collègues députés pour ce travail de qualité. Cette proposition n’est pas laxiste : la légalisation contrôlée par l’État, outre qu’elle garantirait aux consommateurs des produits contrôlés, permettrait d’assécher les trafics tout en générant des recettes fiscales et en créant des emplois. Elle s’accompagnerait d’une véritable politique de prévention auprès des jeunes pour réduire la consommation et les risques. C’est d’ailleurs le choix qui a été fait pour les autres drogues légales que sont le tabac ou l’alcool. Ce débat est donc crucial pour la santé des jeunes.
Le simple fait de montrer ce gobelet (M. François-Michel Lambert montre un gobelet imprimé d’une feuille de chanvre et portant l’inscription : « Légalisation ») pourrait me valoir d’être inquiété pour promotion de la légalisation du cannabis.

Plusieurs députés du groupe LR.
C’est interdit !

M. le président.
S’il vous plaît, arrêtez, monsieur Lambert !

M. François-Michel Lambert.
Le simple fait de sortir ce joint (M. François-Michel Lambert sort du gobelet une cigarette roulée) pourrait créer un esclandre. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. le président.
Monsieur Lambert, il est interdit par notre règlement de brandir ce type d’objet.

M. François-Michel Lambert.
Alors, monsieur le ministre, êtes-vous prêt à ouvrir un débat sans l’instrumentaliser, un débat rationnel, loin des émotions ?

M. Thibault Bazin.
Il n’y a plus d’ordre ici ! On va bientôt fumer du cannabis !

M. le président.
Monsieur Lambert, je vous rappelle à l’ordre avec inscription au procès-verbal.
La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur.
La différence entre vous et moi, monsieur Lambert, c’est que je ne peux pas montrer toutes les dépressions que les drogues occasionnent et qui enragent les familles de France, ni ces mères et ces pères de famille qui se battent tous les jours pour expliquer à leurs enfants que c’est de la merde qu’ils prennent dans leurs veines et qu’ils fument. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem et LR ainsi que sur quelques bancs des groupes Agir ens et UDI-I.) Je ne peux pas montrer toutes ces personnes qui luttent contre des cancers, contre des maladies dépressives, et qui ne résistent pas à cette difficulté ! Car il y a des discours permissifs, comme il y a, pardonnez-moi de le dire, un peu de démagogie dans vos propos.
Très franchement, voyez-vous de la cohérence entre le début du quinquennat, quand vous avez voté pour l’augmentation du prix du paquet de cigarettes à 10 euros parce que vous vouliez lutter contre les cancers, et la légalisation du cannabis ? Voyez-vous de la cohérence du point de vue de la santé publique ? Pensez-vous que les trafiquants, qui font jusqu’à 60 000, 80 000 ou 100 000 euros d’argent liquide par semaine, vont ouvrir une échoppe, déclarer leur argent aux impôts et rentrer chez eux en respectant le code du travail ?

M. Pierre Cordier.
Très bien, Darmanin !

M. Gérald Darmanin, ministre.
Sortez de la naïveté, combattez la drogue et ne baissez pas les bras ! (Vifs applaudissements sur les bancs des groups LaREM, Dem et LR ainsi que sur quelques bancs des groupes Agir ens et UDI-I.)

M. le président.
La parole est à M. François-Michel Lambert.

M. François-Michel Lambert.
Monsieur le ministre, la naïveté, c’est de croire que vous protégez la santé des Français quand vous laissez tous les jours 1 million d’entre eux aux mains des trafiquants. (Mme Mathilde Panot applaudit.) Les autres pays ont apporté une solution : la légalisation ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LT. – Vives protestations sur les bancs du groupe LaREM.)


MAIS AUPARAVANT, UNE AUTRE INTERVENTION CETTE FOIS VENUE DE LA DROITE - et donc de la majorité qui gouverne avec LaReM, sur le thème de l’insécurité et de la lutte contre les violences urbaines dans la Drôme.

Violences urbaines dans la Drôme

M. le président.
La parole est à Mme Emmanuelle Anthoine.

Mme Emmanuelle Anthoine.
Monsieur le Premier ministre, cette semaine, les villes de Romans-sur-Isère et de Valence, dans la Drôme, ont connu plusieurs nuits de violences urbaines.

M. Michel Herbillon.
Que fait Darmanin ?

Mme Emmanuelle Anthoine.
Depuis le début de l’année, de tels faits, pourtant graves, ont tendance à se multiplier dans la Drôme et partout en France. Des coups de feu ont même été échangés sur la voie publique entre bandes rivales, énième manifestation d’une actualité qui nous est insupportable. Nous éprouvons tous une grande lassitude vis-à-vis de cette délinquance et des incivilités qui meurtrissent le vivre-ensemble. Les aspirations légitimes au calme sont sans cesse brisées par des scènes de violence urbaine, de nouveau, par un sentiment d’insécurité, de nouveau, et par une situation qui vous échappe, de nouveau.
Au-delà des graves troubles subis par nos concitoyens, les forces de l’ordre ont essuyé jets de pierre et tirs de mortiers d’artifice. Dans de trop nombreux quartiers, les services de secours ne peuvent plus intervenir sans protection policière, sans se faire attaquer. Ce sont d’ailleurs des guets-apens à l’encontre des sapeurs-pompiers sous escorte policière qui constituent le point de départ des violences de cette semaine. Mais où est donc passée l’autorité de l’État ? Alors que nous déplorions la violence dont les forces de l’ordre font l’objet, suite à l’assassinat de Stéphanie Monfermé, il est temps de réagir face à cette réalité quotidienne intolérable. Les bandes qui n’hésitent pas à prendre à partie les forces de l’ordre sont un phénomène que le Gouvernement semble incapable d’enrayer. Vous avez beau jeu de vous parer de vos nouveaux habits sécuritaires, mais les Français ne se laisseront pas abuser par un tel déguisement. Vous ne pouvez pas masquer votre bilan calamiteux en matière de sécurité au regard de la situation dans notre pays. Quand allez-vous enfin garantir aux Français le droit à vivre en toute sécurité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

M. le président.
La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur.
Madame la députée Anthoine, on peut être d’accord avec beaucoup de vos propos, mais vous oubliez sans doute le principal : s’il y a des troubles dans certains quartiers, notamment à Valence, c’est parce que depuis le mois de janvier, il y a eu 495 interpellations et vingt-cinq réseaux de trafic de stupéfiants démantelés ; c’est parce que la police de la République fait son travail. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.)
Madame, j’aurais également souhaité que vous formuliez, comme vous l’avez pu faire dans le courrier que vous m’avez envoyé, des remerciements au Gouvernement pour les quinze policiers supplémentaires arrivés à Valence, et que vous souligniez le travail extrêmement précis du préfet – que vous connaissez bien – et des services de police. Ce midi encore, trois interpellations supplémentaires de responsables des violences contre les policiers ont eu lieu.

M. Pierre Cordier.
Vous êtes exceptionnel, monsieur le ministre !

M. Gérald Darmanin, ministre.
Voyez-vous, madame, je pense qu’il y a deux façons de voir cette question très compliquée du trafic de stupéfiants : soit on veut la tranquillité et on ne dérange pas les trafics, soit on considère que la police est partout chez elle et qu’elle doit les démanteler. Pour ce faire, des centaines de personnes sont interpellées,…

M. Pierre Cordier.
Ça ne se voit pas.

M. Gérald Darmanin, ministre.
…nous menons la guerre contre la drogue, nous renforçons les policiers et nous travaillons avec les procureurs de la République. Nous faisons un travail qui réglera bien des problèmes pour les prochains ministres de l’intérieur. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem. – Protestations sur les bancs du groupe LR.)

M. le président.
La parole est à Mme Emmanuelle Anthoine.

Mme Emmanuelle Anthoine.
Vous vous félicitez de votre action, mais quel décalage avec ce que vivent les Français ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

M. le président.
La parole est à M. le ministre.

M. Gérald Darmanin, ministre.
Je regrette qu’il ne vous reste pas quelques instants pour nous faire des propositions…

Plusieurs députés du groupe LR.
Oh !

M. Gérald Darmanin, ministre.
…mais mon bureau est ouvert, je les écouterai avec grand plaisir. Madame la députée, vous auriez peut-être pu accompagner l’une des 270 interventions de police effectuées depuis deux mois.

M. Florian Bachelier.
Eh oui !

M. Gérald Darmanin, ministre.
Soixante CRS supplémentaires resteront plusieurs jours dans la commune de Valence : n’hésitez pas à faire des sorties avec les policiers, vous verrez à quel point la fermeté de la République est de retour. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.)

Voir en ligne : Un "Joint" à l’Assemblée nationale

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